samedi 26 décembre 2009
La tabuna des soeurs berbères à Ras El Oued
C'est l'histoire d'une rencontre que les mots peuvent difficilement décrire. Je parlerai plutôt de sensations visuelles, olfactives, gustatives pour parler de cette immersion avec le monde berbère des origines.
Trois femmes habitent une petite maison au sommet de la colline de Ras El Oued. Elles sont tisseuses, bergères, cultivatrices. Elles n'ont pas trouvé de mari, car elles n'avaient pas de dot. Alors elles vivent là, comme autrefois, dans leur grotte. Dans la cour, quelques poules et un coq, un four pour cuire la tabuna, délicieuse galette de pain qu'elles me font goûter avec la confiture de dattes noire et glissante et l'huile d'olive. Inoubliable saveur.
Elles ne parlent pas un mot de français mais dans leurs yeux ce sourire comme une flamme vivante vaut bien tous les langages.
Sur l'horizon le soleil se couche découpant les montagnes du Djebel Dahar, tableau irisé aux allures de film fantastique, quelques femmes berbères en robe rouge, bouffante sur les reins, un grand voile de broderie anglais blanche couvrant la tête, se hâtent vers leurs maisons. Leur démarche oscille de droite à gauche et leur vêture éclabousse de couleur la dernière rue du village qui s'arrête là, brutalement, au-dessus du vide, comme si la dernière pluie torrentielle avait entraîné tout un pan de montagne dans l'oued désertique.
L'odeur de la galette, plaquée sur la paroi de terre brûlante, empli l'espace, avant-goût de délice tiède, et déjà la salive humecte le palais tandis que le coq déchaîné entame une série de cris enroués pour saluer le soleil qui sombre glorieusement derrière la chaîne de montagne.
A l'intérieur de la grotte, la plus âgée des trois soeurs trie une grosse touffe de laine moutonneuse pour en tirer des fils torsadés qui serviront sur le métier à tisser pour un de ces merveilleux killims qui racontent l'histoire de leurs origines en asfour, en losanges, en motifs symboliques, premier langage du monde que leur culture n'a jamais oubliée.
A l'ouest de Ras El Oued, la nuit s'avance, tranquille, glissant dans l'espace comme un souffle qui répand le silence dans la vallée, aujourd'hui comme hier ressemble à demain et la nuit n'en a cure, elle est reine du lieu et le doigt sur la bouche les djins se rassemblent pour quelque farandole sur les crêtes isolées.
Le coq désespéré de perdre la lumière s'est enfin apaisé. La tabuna est cuite. Je plonge la galette dans ce miel noir et liquoreux...et le temps s'est arrêté.
vendredi 25 décembre 2009
Le Gîte de Douiret "Chez Raouf" dans la montagne du Dahar
On vous dit : Habitation troglodyte, peuple berbère en Tunisie ? Et vous pensez aussitôt "Matmata"...Seulement Matmata est maintenant une destination grand tourisme. Moi ce que je vous propose c'est de visiter avec moi un endroit encore quasi ignoré, mais qui intéresse beaucoup les amateurs d'insolite et d'authenticité : Le village ancien de Douiret, dans le Djebel Dahar.
Situation : En sortant de Djerba, prendre la voie romaine, puis la direction de Médenine, ensuite Tataouine. Sortir de Tataouine en direction du Sud. Au petit hameau de Ouled Debab, prendre "douiret" sur la droite et continuer tout droit jusqu'à ce que la route s'arrête. Quelques lacets et quelques bosses plus loin un paysage de conte de fées commence à surgir de terre, et après avoir passé Douiret nouvelle en bas de la montagne, vous levez les yeux, et là vous restez le souffle coupé ! La citadelle-termitière de Douiret et sa petite mosquée blanche s'offre à vos yeux émerveillés !
C'est là que Raouf vous attend avec sa famille berbère, Fahrat, Amor, Yamina, Abdallah, Ahmed, Bel Kassem, et sa petite équipe qui tiennent le gîte troglodyte, un ensemble de chambres berbères rénovées, à flanc de montagne. Un magnifique exemple de ce que le courage d'une famille originaire du village est capable de faire pour sortir des difficultés. Un petit restaurant familial, une vingtaine de chambres, des sanitaires tout neufs, et une vue splendide...Des soirées au son de la darbouka...Tous les frères ont un talent certain pour jouer la musique et vous faire danser.
Des stages sont organisés à des dates ponctuelles, modelage de l'argile, peinture, photo, danse, qi qong, yoga avec leurs amis de Soleil Nomade, une association franco-tunisienne, implantée dans le village et qui soutient l'effort de cette famille berbère dans la rénovation du site.
En arrivant en haut de la route, vous tournez à gauche et vous garez votre véhicule à côté de l'escalier, il ne vous reste plus qu'à grimper une petite centaine de marches. Un âne viendra chercher vos valises, si ce n'est notre courageux Bel Kassem, vif comme un lièvre des montagnes.
Le conte de fée peut commencer...
Situation : En sortant de Djerba, prendre la voie romaine, puis la direction de Médenine, ensuite Tataouine. Sortir de Tataouine en direction du Sud. Au petit hameau de Ouled Debab, prendre "douiret" sur la droite et continuer tout droit jusqu'à ce que la route s'arrête. Quelques lacets et quelques bosses plus loin un paysage de conte de fées commence à surgir de terre, et après avoir passé Douiret nouvelle en bas de la montagne, vous levez les yeux, et là vous restez le souffle coupé ! La citadelle-termitière de Douiret et sa petite mosquée blanche s'offre à vos yeux émerveillés !
C'est là que Raouf vous attend avec sa famille berbère, Fahrat, Amor, Yamina, Abdallah, Ahmed, Bel Kassem, et sa petite équipe qui tiennent le gîte troglodyte, un ensemble de chambres berbères rénovées, à flanc de montagne. Un magnifique exemple de ce que le courage d'une famille originaire du village est capable de faire pour sortir des difficultés. Un petit restaurant familial, une vingtaine de chambres, des sanitaires tout neufs, et une vue splendide...Des soirées au son de la darbouka...Tous les frères ont un talent certain pour jouer la musique et vous faire danser.
Des stages sont organisés à des dates ponctuelles, modelage de l'argile, peinture, photo, danse, qi qong, yoga avec leurs amis de Soleil Nomade, une association franco-tunisienne, implantée dans le village et qui soutient l'effort de cette famille berbère dans la rénovation du site.
En arrivant en haut de la route, vous tournez à gauche et vous garez votre véhicule à côté de l'escalier, il ne vous reste plus qu'à grimper une petite centaine de marches. Un âne viendra chercher vos valises, si ce n'est notre courageux Bel Kassem, vif comme un lièvre des montagnes.
Le conte de fée peut commencer...
mercredi 23 décembre 2009
Djerba l'insolite
J'imaginais Djerba grouillante et détestable, comme le sont ces abords de la grande bleue, polluée par une faune agglutinée sur le sable aseptisé des grands hôtels...et je n'avais pas tort...Mais c'était sans compter sur la surprise d'une île aux multiples secrets, tenant jalousement ses joyaux minuscules et fascinants au coeur de son écrin d'oliviers.
Ce jour là, fatiguée du bruissement des grandes vagues et des alignements de parasols, je suis partie à l'aventure sur une bicyclette tremblante, le chapeau bien enfoncé sur la tête, le foulard pardessous, prenant exemple sur le costume des djerbiennes. J'ai mis le cap sur l'intérieur de l'île, pressentant quelque miracle bien caché.
Evitant de justesse quelques 4X4 déchaînés fonçant vers Guellala, j'entrepris de m'enfoncer dans les oliveraies épanouies sur des pistes sablonneuses. Après 5 kms de pédalage tranquille, je m'arrêtais dans le silence, étonnée de découvrir une île méritant son gracieux nom de Djerba la Douce.
Un enfant nonchalant poussait devant lui un âne non moins pressé, quelques poules bataillaient en grattant le sable, les oliviers trapus et enlacés arboraient de petits fruits serrés hésitant entre le vert et le rouge, tandis que de gracieuses jeunes femmes riaient dans leurs robes multicolores en me faisant des signes de la main.
Je posais mon vélo contre un monticule et l'enfant me fit signe de venir voir par delà le talus. Courant pieds nus devant moi, il escalada lestement un petit mur et je le suivis, amusée autant que curieuse. Puis il s'arrêta et me dit :
-"Regarde !" dans un français parfait et triomphant.
C'était une petite merveille blanche, aux lignes magnifiques, plantée au sommet d'un minuscule tertre, une de ces mosquées oubliées que les touristes ne visitent jamais et que le souvenir d'une paix ancestrale vient nimber de lumière et de sérénité. Une sorte d'édifice bâti avec le coeur en oubliant le fil à plomb, glacée de couches de chaux successives, penchée juste pour émouvoir et faire preuve d'humilité. A l'intérieur de la petite mosquée, la lumière filtrait avec douceur, éclairant une natte couleur de blé et de grandes écritures enlacées, noires sur fond blanc, au sens mystérieux pour moi qui ne connaissait pas la langue arabe.
L'enfant restait silencieux, m'observant de ses grands yeux noirs au milieu d'un visage bruni par l'été. Il s'était assis dans un coin, les genoux poussiéreux remontés jusqu'au visage.
J'ai fait le tour de l'édifice puis je me suis assise sur le pas de la porte.
Dehors Djerba rayonnait de la lumière de midi, deux pigeons roucoulaient dans l'olivier au tronc immense et tordu, dans le ciel ardent un avion déroulait lentement un fil d'argent...Et lentement j'ouvrais mes ailes dans une extase tranquille de papillon émerveillé.
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